Retrouvailles sous tension avec sa créatrice: PV Olivia Moriarty

Ah, l'ennui ! Quand il s'en mêle, ce petit vicieux peut vous pousser à faire des choses... Disons irrationnelles. C'était le cas, récemment, où j'avais transformé cette jeune femme. Pourquoi, mais pourquoi avoir fait ça ? Moi-même je me pose encore la question... Un test, peut-être, je n'ai pas transformé beaucoup de personnes durant mes deux siècles de vie, mais celle-ci semblait avoir une assez grande connaissance du surnaturel pour que je prenne ce risque. Je n'avais absolument pas envie de transformer quelqu'un à qui je devrais tout apprendre par la suite. Alors, bien sûr, je ne savais absolument pas au départ qu'elle s'y connaissait en surnaturel, c'était après une petite discussion, que c'était venu de fil en aiguille.

Pour l'heure, j'étais allongée sur mon lit, j'attendais impatiemment que le soleil se couche, il faudrait vraiment que je trouve une sorcière qui accepte de m'ensorceler un bijou. En attendant, je m'occupais comme je pouvais. J'étais du genre à vivre avec mon temps, alors je regardais la télévision, bien que la plupart des programmes proposés étaient plutôt ridicules. D'un soupir, je me levais de mon lit, pour aller vérifier un peu la lumière extérieure. Il faisait nuit, bien. Je pris une veste puis je sortis de chez moi.

Une fois dehors, je me disais que je pourrais aller passer un peu de bon temps, boire autre chose que du sang, même si un petit festin serait un plus, je pénétrais donc dans le "Rousseau", doucement. Bien évidemment, je n'attirais pas les regards lors de mon entrée, et c'était mieux ainsi. Je faisais en sorte d'être banale, sortir du lot n'était pas mon objectif. Cependant, le mien, de regard, se posa sur une jeune femme au niveau du comptoir, seule. Visiblement, je n'étais pas la seule à vouloir m'aérer les idées. Je m'approchais donc d'elle, avant de m'asseoir à sa droite.

- Je prendrai la même chose qu'elle.

Je ne paraissais pas bien âgée, mais j'étais quand même majeure et ça se voyait. Enfin, ça faisait bien longtemps que j'étais majeure, mais tout ça pour dire que pour de l'alcool, il n'y avait aucun problème. Amara, de son nom, me regarda froidement, en me faisant part de sa déception de me voir.

- Cache ton enthousiasme !

Un sourire en coin se dessina sur mon visage, j'allais peut-être bien pouvoir m'amuser ce soir, finalement !

Je ne montrais aucun regret par rapport à ce que je lui avais fait. En fait, je n'en avais rien à faire qu'elle me déteste ou pas, et si elle voulait me tuer, ça montrerait qu'elle est sur la bonne voie. Faire de cette sainte nitouche une vampire sanguinaire, pas vraiment un projet, plutôt... Je ne sais pas en fait. C'était facultatif, mais elle était jolie, une vampire avec un joli minois c'était toujours un plus, il fallait simplement qu'elle s'assume, qu'elle relâche le frein à main, et qu'elle savoure sa réelle nature.

Je reçus assez rapidement mon verre et j'en avalai une gorgée.  J'écoutais en même temps Amara cracher sa haine avec un trait d'amusement. Elle se montrait plutôt grossière, ce qui était fort dommage, moi qui faisais des efforts pour être amicale... Ou pas.

- Quel langage, c'est dommage que ça sorte de la bouche d'une jolie fille mais c'est bien, tu me hais. La haine peut pousser quelqu'un à agir... Disons de façon peu recommandable.

Je marquais une petite pause le temps de reprendre une gorgée, avant d'appeler le serveur.

- Excusez moi !

Le serveur, enfin le barman interpellé arriva vers nous, j'étais d'humeur joueuse, alors une fois qu'il fut à portée, je plongeai mon regard dans le sien, afin qu'il soit bien attentif à l'hypnose.

- Discrètement, tu vas aller t'entailler le poignet et verser ton sang dans le verre de mon amie.

Bien évidemment, je ne l'avais pas crié, j'avais même été plutôt discrète. Le barman s'exécuta, il prit un couteau et commença à s'entailler le poignet au dessus du verre d'Amara. Je regardais ma création, je me fichais qu'elle soit outrée ou non, il fallait qu'elle s'assume.

- Je te suggère de boire. Ca t'évitera peut-être de tuer quelqu'un.

Oui, j'attaquais sa sensibilité. Peut-être qu'elle préférerait boire le sang de cet homme, qui du coup resterait en vie. Toujours était-il que je n'avais pas hésité à manipuler ce pauvre garçon qui n'avait rien demandé.

En vrai ? Elle commençait déjà à m'ennuyer,  avec toutes ses niaiseries, bientôt elle allait me dire qu'elle voulait un mari, des gosses et une vie "normale", tout le baratin. Je l'avais tuée. Je l'avais transformée, peut-être devrais-je la tuer à nouveau, de façon plus permanente. Est-ce que je me rendais compte de ce que j'avais fait ?

- Oui ta vie est foutue. Ca a tout l'air d'être un choc pour toi. Mais si tu cherches à me faire culpabiliser, ça paiera pas.

Je restais froide, disciplinée. Je ne ressentais ni colère, ni joie. Pour moi, c'était un acte qui n'avait pas d'influence sur ma vie.

- Mais tu ne pourras pas changer. Maintenant, tu es comme tu es, et tu dois t'adapter, ou mourir. Les émotions exacerbées je connais.

Je lui passais le verre de sang coupé dans ce qu'elle avait commandé, et elle ressentit le goût du sang dès la première gorgée. Pour ma part, je vidais mon verre, qui lui ne comportait aucune goutte de sang.

- Ce n'est pas moi qui t'ai servi ce verre. Si quelqu'un est à blâmer, c'est ce barman. D'ailleurs je crois qu'il a fini son service. Si on allait l'attendre pour lui demander des comptes ?

Bien sûr je savais qu'elle ne voudrait pas aller en arrière pour attendre le barman, mais j'allais la motiver un peu.

- J'irai le voir, avec ou sans toi. Réfléchis bien, ta présence pourrait changer la tournure des événements.

Encore une remarque psychologique, pour autant, je la savais intelligente, elle comprendrait: Sans elle, je le tuerais.

Si ça m'avait dérangé ? Là j'étais justement en train de me dire que j'aurais dû la tuer plutôt que de la transformer. Plus le temps passait, et plus je me disais qu'elle n'avait aucun potentiel en tant que vampire. Pauvre enfant qui a perdu sa vie humaine !

- Pourquoi ça devrait me déranger ? Et puis, même si ça me dérangeait, il est trop tard pour changer les choses.

Je lui fis un petit clin d'oeil avant de me remettre à observer le barman. Mais en fait, elle soulevait vraiment la question du pourquoi je l'avais transformée. Un caprice de ma part sans doute. Parfois je pouvais me montrer très immature, à faire des choses sur un coup de tête. Je l'avais vue, et je m'étais décidée. Je pensais qu'elle ferait un bon vampire, à croire que j'avais eu tort. Elle me dit qu'elle ne connaissait pas mon nom, mais dans la foulée j'avais ciblé le barman, elle me supplia, si on veut, de le laisser tranquille, qu'il n'avait rien à voir dans cette histoire. Finalement, elle se décida à venir avec moi, bien. Je me levais donc, après avoir laissé un petit billet pour le verre, puis je pris la direction de la sortie. Là, je bifurquais vers le parking, et je m'appuyai contre un mur. Là, le serveur arriva et je lui bloquai la route.  Je m'exprimais alors, en direction d'Amara.

- Nourris toi sur lui. On verra si tu es capable de lui laisser la vie sauve. Comme je te le disais, la suite des évenements dépend de toi. Si tu refuses de te nourrir sur lui, moi je le ferai, et je ne m'arrêterai pas. Que préfère-tu ?

Malgré moi, je cherchais quand même à voir comment elle se débrouillait, et donc inconsciemment, je jouais mon rôle de créatrice. Mais j'étais aussi curieuse, parviendrait-elle à s'arrêter avant la fin ? Choisirait-elle de me laisser tuer cet homme ? Je passais justement derrière lui, sortant son portefeuille de sa poche discrètement., puis je revins vers Amara et glissai le portefeuille dans sa poche à elle, en lui murmurant à l'oreille.

- S'il survit, tu pourras lui rendre et je te donnerai le mien. Sans mes cartes évidemment, mais avec tout l'argent à l'intérieur. S'il meurt tu garderas celui-là. Je me doute bien que tu n'en as rien à faire de l'argent, mais le fait de lui rendre son portefeuille et de me faire payer en prenant le mien devrait être une motivation suffisante non ? Allez, je prends le pari: tu le tueras.

Oui oui, je devrais avoir honte et blablabla, quelle pauvre petite fleur ! Je ne lui avais pas dit non plus mon prénom, pour l'instant je n'y voyais pas d'intérêt. Surtout que si elle se montrait d'un trop grand ennui, je la tuerais peut-être. Quoi qu'il en soit, elle accéda enfin à ma demande, et partit attaquer le barman. Je ne déployais pas de sourire, pas même de satisfaction. En réalité, j'étais juste en train d'observer sa vraie nature: sa nature de vampire. Un vampire ne devait pas se retenir de boire. Surtout elle, qui finalement vida totalement le barman de son sang. Je l'aurais parié, sa soif de sang avait été plus forte que sa volonté. Une fois l'homme totalement vidé de sa substance rouge, ma création se retrouva contre un mur, en pleurant, ce qui me fit rouler des yeux. Elle s'approcha alors avant de me mettre une baffe. Mais la baffe fut bien vite oubliée lorsque je ricanai à sa menace. Je l'attrapai alors par la gorge et la plaquai contre le mur.

- Me tuer ? Tu n'as pas assez de cran pour ça. Mais peut-être, moi, devrais-je mettre fin à ta pitoyable existence ?

Je la relâchai en reculant légèrement, elle était pathétique, il fallait lui apprendre ce que signifiait être un vampire.

- Tu sais pourquoi tu n'as pas pu t'arrêter à temps ? Ta volonté n'est pas assez forte. Et tu sais comment on se maîtrise ? En s'entraînant. Avec le temps, tu arriveras peut-être à épargner des vies en te nourrissant. Aujourd'hui, tu as reçu une leçon. Et si tu ne supportes pas ta condition, Tu peux toujours te planter un pieu dans le coeur, ou bien attendre que le soleil se lève, sans bijou ensorcelé.

Je me fichais d'avoir l'air froide, ou même qu'Amara me déteste. Elle ne m'amusait même plus, mais elle ne pourrait pas nier que j'avais raison. Le contrôle de sa soif, ça vient avec de la volonté et du temps.

- Tu sais, tu as tué un homme ici, mais le fait que tu te sois rassasiée sur lui t'empêchera peut-être de tuer dix personnes ailleurs. Plus tu te retiens, plus c'est dur de te contrôler.

Est-ce que j'en avais quelque chose à faire de la vie de l'homme qu'elle venait de tuer ? Si son but était de me faire culpabiliser, elle pourrait attendre longtemps. J'assumais mes actes, peu importaient les conséquences. J'avais déjà passé cette étape, et maintenant je croquais ma vie éternelle à pleine dent, les humains n'étaient pas au sommet de la chaîne alimentaire, et ce qui les dépasse, ils le détruisent. Alors qu'elle ne vienne pas me parler d'humanité, parce que les humains ne faisaient pas mieux. En fait, j'étais plus humaine qu'elle pouvait le penser: les humains eux aussi étaient capables de monstruosités.

- Regarde dans le répertoire de son téléphone, tu le sauras.

Ma réponse était froide, avant que je ne la plaque contre le mur, menaçant de mettre un terme à sa pitoyable existence. Elle ne résistait pas, comme si elle attendait que la mort vienne. Je n'aurais aucun mal à la tuer, mais ce serait trop facile. Mais elle perdit ses nerfs, et se montra grossière. Là, il fallait lui apprendre les bonnes manières à cette fille, dans un premier temps, elle me provoqua un rire. Un rire à glacer le sang.

- Que tu le veuilles ou non ma petite, je serai dans ta vie à jamais. C'est mon sang qui t'a transformée, et qui te suivra où que tu ailles.

Même si je faisais preuve d'un calme déroutant, une partie de moi désirait lui faire mal davantage pour les mots qu'elle venait d'employer, mais visiblement elle n'avait pas fini de cracher son venin, puisqu'elle continua à jouer sa sainte nitouche qui me donnait envie de vomir. Elle parla d'un chasseur de vampires, et un nouvel éclat de rire sortit de ma gorge.

- Ma pauvre, tu fais pitié, tu ne connais rien à la vie. Si tu vas chercher un chasseur de vampires, tu serais la première à en mourir. Mais mourir ne te dérange pas... Tu dois donc comprendre quelque chose.

Mon regard fixa le sien, pas dans le but de l'hypnotiser puisque je ne pouvais pas hypnotiser un autre vampire, mais mon regard changea rapidement, pour laisser apparaître les ténèbres caractéristiques des vampires. Une seconde plus tard, j'enfonçai mes crocs dans la carotide de cette pleureuse. Un autre défi donc: allait-elle chercher à résister, et donc choisir d'assumer sa nature et donc de ne pas être une proie, ou allait-elle continuer à s'estimer humaine, et me laisser boire la totalité de son sang ? Ca ne la tuerait pas, bien sûr, mais elle devrait se nourrir pour recouvrer ses forces. Ma morsure n'était pas tendre, je voulais qu'elle souffre pour son manque de respect et son arrogance mal placés.

J'avais transformé cette fille, et j'étais en train de me dire s'il aurait pas mieux valu que je la tue. Chose qui pouvait encore s'arranger, mais d'un autre côté ce serait lui rendre service, une éternité de souffrances... Voilà ce qu'elle méritait, et elle ne me pousserait pas à abréger ses souffrances. Je n'ai aucun honneur ? Non, c'est vrai, et ça m'allait très bien comme ça. Je restais froide, insensible à ses plaintes, ses mots d'humeur, et ses gifles.

- Pourquoi en aurais-je ? Les humains sont notre source de nourriture. Respectent-ils les vaches ?

Cette fille semblait incapable de comprendre quoi que ce soit, une idiote, voilà ce qu'elle était. Une idiote dans un corps de vampire, qui devait sans doute le plus souvent faire comme aujourd'hui: tuer, puis pleurer. C'était d'un ennui... Elle sous-entendit ensuite que c'était moi l'idiote, ce qui me fit lâcher un léger rire malsain, elle espérait vraiment qu'elle me gaverait tellement que je la tuerais... Je ne lui ferai pas ce plaisir. Cependant, ma seule réponse furent mes crocs qui se plantèrent dans sa carotide. Elle me demanda alors d'arrêter, mais je n'avais pas envie. Il fallait qu'elle comprenne qui commande. Soudain, sans signes avant coureur, une brûlure. Mais d'où venait-elle ? Quoi qu'il en soit, ça me poussa à me reculer, retirant sans ménagement mes crocs de la chair d'Amara. Mon bras... Si je devais comparer, on pourrait croire que mon bras avait été exposé au soleil. Je grognais de douleur, mais ça devait être la faute à Amara, d'une façon ou d'une autre.

- Qu'est-ce que t'as fait ?

J'avais encore son sang au niveau de la bouche, et il me faudrait visiblement du sang supplémentaire pour guérir mon bras. Je me projetais alors contre Amara, énervée, et la plaquais contre le mur derrière elle, la tenant par le col.

- Réponds ! Qu'est-ce que tu m'as fait ?

Là, j'étais dans un état second, et une colère qui était venue aussi subitement que cette brûlure. Cette nuit allait être longue...