Nouvelle rencontre - Selena/Mia

Il faisait déjà nuit au dessus de la Nouvelle-Orléans. Je n'étais pas là depuis très longtemps, mais l'ambiance me plaisait. Au cour de mon petit siècle d'existence, je n'avais jamais pris le temps de visiter cette ville, voilà qui était donc chose faite. A cet instant précis, j'étais déjà repue, si tant est qu'un vampire puisse être repu, mais disons que je m'étais déjà nourrie ce soir, voilà donc qui n'était plus à faire ! La lune était loin d'être pleine, donc c'était le bon moment pour être dehors. Les soirs de pleine lune, je préférais éviter, il serait bien malheureux que je finisse mordue par un loup-garou en furie. Là, aujourd'hui, si je venais à rencontrer un loup, il serait forcément de forme humaine, sauf si c'était plus compliqué que cela. Bref, une bonne soirée pour se promener, il ne pleuvait pas, c'était agréable, cela dit je n'avais aucune notion du chaud et du froid -exception faite pour le feu évidemment. Mais le temps était important ne serait-ce que pour le moral, la pluie aura toujours été aussi déprimante, alors que le temps sec était plus... Plaisant.

Revenant de mon repas, je décidai de passer un peu par chez moi afin d'aller prendre une douche, afin d'éviter tout soupçon. Une fois dévêtue, je me glissais dans la douche, avant d'enclencher le jet d'eau. Je pris un peu mon temps, je n'étais pas pressée, puis je sortis, une fois assurée d'être propre. Là, je sortis de ma salle de bain entourée d'une simple serviette, j'étais de toute façon seule chez moi, et les volets étaient fermés, personne ne risquait de me voir ainsi à moi que je ne reçoive une visite inattendu, ce qui était rare sachant que pour le moment, je ne connaissais personne à la Nouvelle-Orléans. Il y avait toujours ces foutus démarcheurs, mais si l'un d'entre eux se pointait chez moi, il me servirait de supplément. Je partis m'habiller dans ma chambre, puis, une fois habillée, je mis une veste, je pris mon portefeuille qui était relativement plein, ce qui était contradictoire avec le fait que je ne travaillais pas. Que voulez-vous que je vous dise ? Avec le temps, on amasse des richesses. Bref, une fois que j'eus tout ce qu'il fallait, je sortis de chez moi avant de fermer la porte à clé. Mais, alors que je rangeais ma clé dans ma poche, en ressortant ma main, je ne remarquai pas que mon portefeuille avait suivi le mouvement, et s'était retrouvé au sol. Je continuais donc ma lente marche, sans me rendre compte de ce qu'il venait de se passer. La ruelle était relativement peu fréquentée, donc les chances que quelqu'un m'ait vue le faire tomber était faible.

Nouvelle rencontre.
I've flown a million miles and I've rode so many more. ••• La pleine lune était passée depuis deux jours maintenant et les courbatures étaient encore fraiches. Chaque mouvement semblait plus douloureux que le précédent. Le travail aurait été plus que laborieux dans un tel état. J’avais la chance d’avoir un patron aussi compréhensif. Toutefois, je pense que si je n’avais pas été irréprochable depuis le début, il ne m’aurait jamais accordé ces quelques jours de repos consécutifs. Debout à côté du lit dans ma misérable chambre d’hôtel, je tentais de m’étirer. Je prenais le temps de faire rouler chacun de mes muscles, grimaçant lorsque ça me semblait tirer plus que nécessaire. Après dix bonnes minutes à forcer sur un corps récalcitrant, je soupirais lourdement et me laissais retomber sur le lit.

Il est hors de question que je reste ici plus longtemps !

L’hôtel sentait le renfermé et j'étais loin d'être une louve d'intérieure. Je préférais de loin les espaces aérés. Sans parler des bruits que j’étais susceptible de capter involontairement et qui ne me rassuraient jamais vraiment. Je rassemblai le peu de force qui me restait pour prendre une douche et me vêtir. Une robe fluide sombre, des bottines noires, une veste en cuir et je quittais cet endroit qui avait fini par me dégoûter. J’étais à deux doigts d’aller vivre avec Abigail dans le vieil entrepôt. Au moins, si ça puait, je savais pourquoi. Ici, j’avais la sensation qu’un corps sans vie avait été oublié dans une des chambres. Je préférerais ne plus être là quand on irait vérifier. Rien que d’y penser, un relent gastrique me saisit que je chassais d’un revers de la main mental.

Une fois dans la rue, je pris une profonde et longue inspiration. Même mes côtes m’en voulaient de ces transformations mensuelles. Je n’y étais pour rien ! Je secouais la tête et me mis en route. Je n’avais aucune idée de l’endroit où je me dirigeais mais j’y allais non sans peine. J’étais loin d’être aussi gracieuse et légère qu’à mon habitude. J’avais la sensation d’avoir un poids de 10 kg à chacune de mes chevilles. Quelques mètres et ma respiration se faisait déjà courte. Pourtant je ne comptais pas m’arrêter en si bon chemin. A force d'effort, mon corps finirait bien par comprendre qu'il n'avait d'autre choix que de faire ce pour quoi il était conçu. Après tous ces mois de transformations, il aurait du en prendre l'habitude pourtant non ?

Une petite brise nocturne caressait agréablement mon visage et se glissait dans mes boucles brunes. Je ne pus contenir une pensée pour mon loup préféré, me demandant ce qu’il faisait à cet instant précis, s’il était aussi en difficulté que moi, s’il pensait à moi… Je rougis à cette idée puis butai sur quelque chose sans le vouloir.

Tiens… murmurais-je en m’accroupissant très lentement pour ramasser ma trouvaille.

Un porte-monnaie. Je fronçais les sourcils tout en regardant autour de moi. Quelques années en arrière, j’aurais fouillé sans le moindre scrupule et aurais pris jusqu’au dernier centime. Mais il n’était plus question de ça depuis Lyam. Je serrais le porte-monnaie un moment entre mains, jetant un nouvel oeil aux alentours. La rue était vide. Je finis par ouvrir l’objet, à la recherche d’une identité, une adresse, un numéro. N’importe quoi qui aurait pu m’aider à trouver son propriétaire. Malgré tout, piquée par la curiosité, je ne pus m’empêcher de regarder dans le compartiment des billets. J’ouvris grands les yeux, ahurie de voir autant de billets. Donc je pouvais bien en prendre un petit… Je secouais la tête et repris la fouille consciencieusement.

Finalement, je trouvais un permis de conduire. J’avais donc enfin une photo et une adresse. Encore fallait-il que ce soit la bonne... Je soupirais. Malheureusement, ça ne l’était pas. C'était bien ma vaine n'est-ce pas...

Et comment je fais pour lui rendre ses sous à cette idiote ? Même pas fichue de mettre sa nouvelle adresse sur son permis ! râlais-je à voix haute, ne faisant pas bien attention à la personne qui arrivait en face de moi.

Quand celle-ci arriva à ma portée, je levais les yeux. Je tenais toujours le porte-monnaie ouvert dans mes mains. La jeune femme ne manqua pas de le remarquer et je la reconnus. Elle était la femme en photo sur le permis. La propriétaire était probablement revenue sur ses pas. Je souriais en espérant in petto qu’elle n’avait pas entendu ce que je venais de me dire à moi-même.

C’est le vôtre ? demandais-je alors d’une voix neutre bien que j'avais la réponse. Je ne comptais pas le lui rendre aussi facilement. N’importe qui pouvait mentir pour pouvoir récupérer ce qu’il contenait, sans savoir si j'avais fouillé ou non à l'intérieur. Je n’hésiterais pas à lui demander de me prouver que ça lui appartenait. :copyright:️ 2981 12289 0

J'avançais, encore et encore, dans ces ruelles sombres, sans me rendre compte de ma bêtise. J'étais distraite par... On ne sait quoi. Le temps que je réalise ce qu'il s'était passé, quelqu'un aurait pu avoir tôt fait de se servir. De plus, le portefeuille disposait d'une quantité non négligeable d'argent, volé certes, mais une grande quantité quand même. Et puisque c'était de l'argent volé, je ne ferais pas la fine bouche là dessus, idem pour mon permis de conduire, c'était un faux. Voilà ce qu'il m'arriva de penser lorsque je me rendis compte de ma perte. Bien que ce n'était pas très important, je pris le temps de faire demi-tour.

- Merde, quelle idiote !

Ce n'était certes pas la première fois que ça m'arrivait, et probablement pas la dernière, mais c'était quand même un peu de temps de perdu. Heureusement, ce soir, je n'avais rien de prévu et pus prendre le temps de retourner sur mes pas. Je risquais de ne pas le retrouver, mais je me devais d'essayer, au cas où. Je progressais alors, lentement, sur mes pas, observant chaque recoin où pouvait se trouver mon portefeuille. Quelque chose d'important cela dit: il ne pleuvait pas, le portefeuille et l'argent n'étaient donc pas humides, et étaient donc susceptibles d'intéresser quelqu'un. Et s'il s'agissait d'une personne honnête, alors elle ne pourrait même pas me le rapporter à mon adresse, puisque celle sur mon permis de conduire était fausse - Pour éviter que dans ces situations, des gens me retrouvent justement, car il y avait aussi un risque que ce soit l'un de mes ennemis, ou alors une personne mal intentionnée telle qu'un chasseur qui le ramasse.

[color=red- Allez, Selena ! Peu de monde est passé par là, tu peux le retrouver ![/color]

Je parlais toute seule, oui, mais en réalité, ce n'était pas de la folie. Je pensais juste tout haut, rien de plus. Pourtant, on pouvait un peu dire que j'étais folle, rares étaient les gens qui considéraient la mort comme banale, comme un fait fréquent de la vie. Je n'avais pas honte de penser comme une tueuse en série, et puis, je l'étais techniquement, non ? Bref, en avançant, je remarquai une femme, qui fouillait dans quelque chose... Dans mon portefeuille. J'avais eu de la chance, je l'avais trouvée avant qu'elle ne l'embarque, je pouvais donc le récupérer. Pour autant, elle ne semblait pas déterminée à me le rendre comme ça. J'allais donc peut-être pouvoir m'amuser avec elle avant de récupérer mon dû.

- Ca l'est, et même si ça en l'était pas, qu'est-ce que vous feriez ?

J'avais une lueur de défi dans le regard. Je savais que mon attitude ne l'inciterait probablement pas à me rendre le portefeuille, mais en réalité, je savais que je pourrais lui reprendre assez facilement. Et puis, elle avait ma photo, donc elle devait savoir que c'était le mien. A partir de là, si elle ne me le rendait pas, c'est qu'elle serait disposée à le garder. L'issue de cette rencontre allait donc dépendre d'elle, mais si vraiment elle m'amusait, je serais peut-être disposée à lui laisser quelques billets. Après tout, ils ne me manqueraient pas. J'avais également une autre option: celle de la laisser repartir avec le portefeuille. C'était une possibilité aussi, je me fichais un peu du contenu, je pourrais en rassembler bien assez vite, de l'argent. D'autant que ma carte bancaire, elle, était toujours en ma possession.

- Alors, montrez moi de quel bois vous êtes faites !

Dans un langage plus courant, on pourrait considérer comme un "chiche tu le gardes". je ne quittais pas mon air de défi. Je n'avais de toute façon pas envie de venir aux mains pour ça. Franchement un portefeuille, ça m'importait peu donc si elle s'entêtait, je le lui laisserais sans hésitation. De plus, son sang ne m'attirait même pas, ce qui me laissait croire qu'elle n'était pas humaine. Pas que j'avais des problèmes avec les autres espèces non... Mais le seul sang que je buvais était humain. Ou sorcier, à la rigueur.

Nouvelle rencontre.
I've flown a million miles and I've rode so many more. ••• Vraisemblablement, mon rôle de bon samaritain de ce soir n’avait pas eu l’effet escompté. Bien au contraire. Le blonde qui venait de me rejoindre semblait avoir du caractère à revendre. Il me semblait aussi assez clair qu’elle n’était pas humaine. J’étais encore trop loin pour être sûre de ce qu’elle était, mais je n’allais certainement pas tarder à le savoir. C'était sur le ton du défi qu'elle me demandait ce que je comptais faire si ce que je tenais n'était pas à elle. Je n'aimais pas beaucoup cette pointe de dédain dans sa voix et ne pus m'empêcher d'employer le même.

Si ça ne l’était pas, je le garderais, jusqu'à ce que je trouve son propriétaire. Mais peut-être que d'ici là, il n'y aurait plus beaucoup de billets à rendre.

N’y avait-il pas un adage qui disait « trouvé c’est gardé » ? Alors j'aurais très bien pu en faire ma possession. Le porte-monnaie en soit ne m'intéressait pas le moins du monde. En revanche, l'argent m'aurait été bien utile. J'aurais peut-être pu prétendre à trouver un meilleur endroit pour dormir et enfin quitter le trou à rat que j'avais trouvé au dernier moment. Au sourire qu’elle affichait, je devinais aisément qu’elle souhaitait s’amuser et qu’elle venait de trouver une nouvelle distraction. C’était bien le soir. Avec les courbatures qu’il me restait, je n’allais pas passer la meilleure des soirées de ma vie. Elle risquait de parvenir à me faire regretter d’avoir quitté ma chambre d’hôtel.

Une brise finit par se lever et avec elle me parvint l'odeur de la jeune femme jusqu'à mes narines sensibles de louve. Je plissais le nez. Cette odeur. Elle sentait la mort. Elle sentait la mort depuis un moment déjà. Je fronçais un peu les sourcils. Je n’en avais pas croisé énormément mais la mort était leur signature. Une vampire. Je n’avais absolument rien contre sa race. C’était toutefois dans mes gênes - je crois - de ne pas particulièrement aimé leur odeur. Evidemment, leur réputation les précédait. Ils étaient connus pour être des êtres sanguinaires, dénués d’émotions, égoïstes. Heureusement que je n’étais pas du genre à écouter les on-dits.

Vous voulez jouer ? demandais-je presque sur le même ton malgré moi.

Jouer… Voilà que je me prenais à son jeu. Soyons honnête, je n’en mènerais pas large face à une vampire de plusieurs années, voire plusieurs siècles. C'était impossible de deviner son âge qu'en la regardant. Je ne pouvais pas non plus me fier à son permis de conduire. Si l'on devait en venir aux mains - ou plutôt aux crocs - je ne me démonterais pas évidemment. Toutefois, je ne voyais pas bien comment jouer avec elle. Je n’étais pas hyper douée pour lancer des défis. A croire que mon instincts de survie était bien meilleur que je le pensais.

La lueur que je percevais dans ses yeux ne m’indiquait pas qu’elle comptait me faire du mal. Elle ne m'indiquait pas qu'elle me voulait du bien non plus. Je devais demeurer sur mes gardes. L’on était jamais à l’abri de tomber sur un parfait sociopathe. Je n’étais pas venue à la Nouvelle-Orléans pour me faire des ennemis. Ni pour devenir du gibier de potence, une proie. Normalement c’était à moi de chasser. Pas d’être chassée…

Si je le gardais, qu’est-ce que vous, vous feriez ? Je doute que vous ne vouliez me vider de mon sang.

Ok Mia, provoquer une vampire n’était peut-être pas l’idée du siècle. :copyright:️ 2981 12289 0

Cette jeune femme était plutôt jolie, et elle semblait vouloir jouer au même jeu que moi. Ma question aurait pu paraître agressive, si elle avait été posée sous un ton qui l'était. En réalité, j'étais curieuse: qu'allait-elle choisir ? et comme je l'avais déjà imaginé, ce petit jeu irait bon train, et si elle gagnait, peut-être que je daignerais lui laisser mon argent, auquel je ne portais pas tant d'importance que cela. Après tout, j'en avais encore pas mal en réserve, fruit de nombreux larcins durant mon éternité. Je n'avais pas d'emploi, alors la plupart du temps, c'étaient mes victimes qui me "payaient", bien malgré elles. Bref, mon interlocutrice me répondit, alors si ce n'était pas mon portefeuille, ainsi, elle chercherait à retrouver le propriétaire, même s'il ne resterait que peu de billets. Cette phrase me fit sourire, elle avait du répondant, et surtout elle venait me confirmer qu'elle convoitait mon argent.

- Oh mais je ne blâmerais personne pour la disparition de ces billets, dans une situation inversée je ne vous laisserais même pas revoir la couleur de votre portefeuille.

Autant être honnête non ? Cela m'était déjà arrivé de trouver des portefeuilles, dans chacun des cas je l'avais gardé, et je m'attendais à ce que cette fille en fasse autant. En réalité, j'étais en train de la tester. C'était l'épisode portefeuille là, mais peut-être qu'après cet épisode, qu'elle décide de le garder ou de me le rendre, nous pourrions discuter plus sérieusement, faire connaissance, même si c'est rare de fraterniser avec quelqu'un qui vous a piqué votre portefeuille, moi j'étais comme ça, et surtout, même si je ne draguais pas, ça ne me faisait pas de mal de faire plaisir à une fille. Elle semblait vraiment désirer cet argent, je pouvais le lire dans son regard, c'était l'une des raisons pour lesquelles je ne lui avais pas encore arraché ce portefeuille des mains. Je n'aurais peut-être pas été aussi indulgente s'il s'agissait d'un homme. Celle dont je ne connaissais pas le nom me tira alors de mes pensées, en me demandant, sur le même ton que j'avais emprunté, si je voulais jouer. Finalement, mon coup de poker avait fonctionné, la voilà qui tombait dans mon jeu. Le fait que je ne veuille pas en venir aux mains la mettait probablement en confiance, et j'aurais pu éventuellement en profiter pour me nourrir de son sang... Si elle avait été humaine. La légère brise qui s'était levée m'avait permis de constater que ce n'était pas le cas. Mais sa dernière remarque me confirma qu'elle savait que j'étais un vampire, autant que je la suive alors !

- Non je ne le veux pas, je ne bois pas le sang des loups-garous.

Je n'avais rien contre son espèce particulièrement, mais le sang de loups-garous était beaucoup moins bon que l'habituel sang humain.

- Ce que je ferais si vous le gardiez, ça dépend de comment évolue cette conversation. Mais peut-être que si vous le mettiez rapidement dans votre poche, je perdrais la mémoire...

Et voilà, une perche tendue. Qu'allait-elle faire ?

Nouvelle rencontre.
I've flown a million miles and I've rode so many more. ••• Les muscles tendus malgré moi, je continuais de penser que de provoquer cette immortelle était une très mauvaise idée. Je ne savais pas de quoi elle était capable. La seule chose dont j’étais certaine était qu’elle était une vampire et que la précédente pleine lune ne m’ayant pas laissée indemne, je risquais de m’en sortir difficilement. Si nous en venions en mains et que je m’en sortais. Cette situation contenait bien trop de supposition à mon goût.

Je me mordis l’intérieur de la joue. Pourtant, j’étais quelque peu étonnée de l’entendre dire qu’il aurait été normal que je ne lui rende pas son bien. Je posais sur elle de grands yeux ronds. Etait-elle sérieuse ? Tentait-elle de me provoquer ? Voulait-elle simplement me tester ? Le doute s’insinua en moi. Les rumeurs que j’avais pu entendre, disaient que les vampires étaient des êtres fourbes et manipulateurs. Je n’étais pas du genre à me contenter des on-dit mais ma nature méfiante me poussait à garder cette idée dans un recoin de mon esprit. Juste au cas où. Mieux valait s’attendre au pire et ne pas l’affronter, que d’être trop confiant.

Voilà qu’elle confirmait à voix haute ce dont j’étais déjà sûre. Mon sang ne l’intéressait pas. A croire qu’il devait avoir un goût particulier pour ses papilles surnaturelles. Il y avait une rivalité naturelle entre nos deux races. J’ignorais tellement de choses que ça aussi j’étais bien incapable de comprendre pourquoi. Pourtant, toutes deux nous étions esclaves de la nuit, moi plus particulièrement les soirs de pleine lune. Nous ne pouvions pas lutter contre nos instincts, nos besoins. Nous alimentions toutes les deux bon nombres de légende que les humains pensaient n’être que cela. Des Légendes. Des histoires qui se racontaient depuis toujours mais qui n’étaient que le fruit de l’imagination de quelques fous. Ils étaient encore si peu à connaitre la vérité. Avec tous ces points communs, j’avouais avoir toujours été curieuse de rencontrer cet autre être nocturne. Je n’aurais jamais pensé que la rencontre pourrait tourner à mon désavantage.

Les pieds bien ancrés dans le sol, le coeur continuant à battre d’un rythme tempéré, je demeurais prête à me défendre si c’était nécessaire. Pour le moment, nous ne faisions qu’échanger quelques mots, mais il y avait une tension palpable dans l’air. Elle m’incitait à garder son porte-monnaie, son argent, me faisant comprendre implicitement que ça ne lui manquerait pas. Je posais de nouveau le regard sur le cuir entre mes mains, puis sur la vampire. Les billes brunes firent plusieurs aller-retour ainsi pendant de longues secondes.

Finalement, une pointe de fierté me piqua et je fis un pas en avant pour lui tendre l’objet, la regardant droit dans les yeux, cette lueur de défi toujours présente.

Vous ne seriez pas revenue sur vos pas, je l’aurais gardé. Mais puisque vous êtes face à moi… Je suis trop honnête pour faire ce que vous suggérez.

Je redressais la tête, bombais presque le torse. J’avais eu ma période malhonnête et ça ne m’avait pas réussi. J’avais fait des choses dont je n’étais pas fière, j’avais tué un homme et avais déclenché ce gêne que je n’étais pas certaine d’assumer.

Une fois qu’elle reprit son bien, je glissais mes mains dans mes poches. Une nouvelle brise se leva et caressa agréablement mon visage. Un fin sourire apparut sur mes lèvres. Je ne savais pas ce que ferait la blonde par la suite, mais je ne regrettais plus d’avoir quitté ma chambre d’hôtel. :copyright:️ 2981 12289 0

Visiblement, mes décisions troublaient cette femme. En même temps, une personne sensée n'aurait fait que reprendre son portefeuille et tourner le dos, mais pas moi. Je n'ai jamais dit que j'étais sensée. Et puis, c'était bien amusant de voir la louve se poser des questions, elle ne semblait pas vraiment savoir pourquoi je faisais ça. En réalité, je voulais voir de quel bois elle était faite. Honnête, ou l'attrait du gain serait plus fort ? Elle hésitait, ça c'était une certitude, j'avais déjà en tête mes prochaines actions selon son choix. Les bras croisés, j'attendais sa décision, qui peinait à venir. Visiblement, je l'avais emmenée sur un terrain qui la poussait à réfléchir. Quoi qu'il en soit, peu importe sa décision, je savais ce que je ferais ensuite. J'avais une longueur d'avance sur elle. Heureusement qu'elle y réfléchissait d'ailleurs, n'importe qui développerait un attrait pour une telle somme si facile. Personnellement, si je trouvais un portefeuille aussi rempli, je le garderais sans hésiter. Mais peut-être cette fille était-elle quelqu'un de "bien", ce terme étant à prendre avec des pincettes évidemment. Personne n'est "bien", tout le monde a enfoui en lui - bien que ce soit plus visible chez certaines personnes- un côté obscur. Finalement, elle sembla gagner en assurance lorsqu'elle me fit part de sa décision, en me tendant mon portefeuille, prétendant qu'elle était "trop honnête" pour faire "ce que je lui suggérais". Un rictus se dessina sur mon visage, trop honnête oui, sans aucun doute. Mais moi je ne l'étais pas. Alors, profitant de la proximité avec elle lorsqu'elle me rendit mon portefeuille, je glissais discrètement ma main dans sa poche pour me saisir du premier objet qui se présenta à moi: un morceau de papier. Pas très important à première vue, mais l'objectif n'était que symbolique. Bref, après avoir saisi ce morceau de papier et récupéré mon portefeuille, je mis le tout dans ma poche avant de reculer, sans avoir quitté mon rictus.

- L'honnêteté est une faiblesse.

J'étais satisfaite. Bien que je doutais de l'impact qu'aurait la disparition de son papier, si ça se trouvait ce n'était rien d'important. Mais comme je le disais, c'était plus symbolique qu'autre chose. Quand elle s'en rendrait compte, elle saurait que j'ai réussi à lui faire les poches tranquillement, alors qu'elle se vantait de son honnêteté. La perte de ce papier donnerait des actes à mes paroles. J'avais d'ailleurs eu raison de profiter du fait qu'elle me rende mon portefeuille, car une fois cela fait elle remit ses mains dans ses poches. Allait-elle se rendre compte de la disparition de son bout de papier ?

Nouvelle rencontre.
I've flown a million miles and I've rode so many more. ••• Peut-être étais-je trop honnête dans un monde qui était tout l’inverse. Peut-être étais-je même naïve. Malgré tout, je n’allais pas laisser une étrangère me dicter mon comportement. Je n’avais jamais vraiment été une louve docile et je n’allais pas commencer ce soir. Vraisemblablement, l’immortelle et moi-même n’étions pas dans les mêmes dispositions ce soir, nous ne cherchions pas à nous divertir de la même façon. Je n’étais jamais contre une nouvelle rencontre, un nouvel échange, bien au contraire. Cependant, cette fois-ci, j’avais le pressentiment que je prenais part à un jeu dont j’ignorais encore les règles. Alors c’était tout naturellement que je demeurais sur mes gardes.

Alors par mesure de sécurité, il était préférable que je lui rende son porte-monnaie. C’était pas parce qu’elle m’assurait qu’elle n’avait rien contre le fait que je le garde, que je devais la croire sur parole. Alors je le lui remis sans plus attendre. Ce qu’elle qualifiait ensuite de faiblesse était au contraire preuve de grandeur. Car l’honnête dans un monde entouré de menteurs était celui qui se démarquait le plus. Je souris à cette pensée mais la gardais pour moi. Il était inutile que je commence en plus à la vexer.

Par réflexe, je remis ensuite les mains dans mes poches. J’avais depuis quelques temps un réflexe idiot et anodin mais pourtant si rassurant. Dans ma poche droite se trouvait un morceau de papier plié que je chérissais plus qu’autre chose. Les derniers mots de Lyam avant qu’il ne fuit comme un lâche une situation qui lui déplaisait. J’avais certes fini par lui pardonner et étais plus que ravie qu’il fasse repartie de ma vie. Sans lui, je n’étais que l’ombre de moi-même. Bref. Sur le papier, il y avait une chanson qu’il m’avait écrite dont le sens était encore obscure à mes yeux. Malgré cela, je le gardais précieusement toujours sur moi. Je l’avais lu, relu, et re relu maintes et maintes fois, si bien que la cellulose avait fini par lâcher à certains endroits. Je l’avais alors réparé avec un peu de scotch et m’étais promise de ne plus l’ouvrir, simplement de le garder. Après tout, depuis le temps, j’en connaissais les mots par coeur et depuis peu, avais eu la chance d’en découvrir la mélodie.

Toutefois, je ne trouvais là rien d’autre que du tissu synthétique. Je déglutis. Je me mis à tâter la poche avec de plus en plus de frénésie. La chanson n’était plus là. Un vent de panique m’assaillit alors que je me demandais où elle avait pu passé. Et s’il était tombé ? Je ne l’avais quand même pas oublié à l’hôtel ? Non. Je savais que non. Je regardais d’abord par terre, à mes pieds, derrière moi. Je passerais toute la nuit à le retrouver s’il le fallait. Le souffle commençait à se faire court. Je savais que c’était ridicule, mais c’était plus fort que moi. Je finis par poser les yeux sur la blonde face à moi. A son regard insistant à mon encontre, je compris. Je compris qu’elle était coupable de cette disparition. Essayait-elle de me donner une leçon ? Attendait-elle une réaction de ma part ? Elle l’aurait. Je serrais les dents, les poings, tandis qu’un grognement faisait frémir ma poitrine. Je fixais sur elle des prunelles sombres, faisant fi de son statut de vampire. Tout ce que je souhaitais était de récupérer mon bien. Il n’avait certes qu’une valeur sentimentale, mais c’était l’objet le plus précieux que je possédais.

Rendez-le moi, grognais-je. Et ne me demandez pas ce que je ferais si vous ne le faisiez pas, c’est inutile.

Je savais parfaitement que du haut de mon mètre soixante je n’étais pas la plus menaçante des créatures, mais je n’allais pas la laisser partir avec ma chanson sans rien dire. Ca pouvait paraitre dérisoire de faire toute une histoire pour pas grand chose finalement. Surtout quand on savait que la personne qui m’avait écrit ça était de nouveau dans ma vie. Mais je n’étais pas quelqu’un de réfléchi. J’étais une impulsive, je parlais avec mon instinct, mes tripes. Et dans l’immédiat, mes poings serrés avait quitté mes poches. Je faisais fi de la douleur que la précédente pleine lune m’avait laissée. J’avais même avancé de deux pas, me rapprochant dangereusement de la jeune femme. Dangereux pour qui ? C’était encore à déterminer. :copyright:️ 2981 12289 0

J'étais satisfaite de mon méfait. Allais-je maintenant lui rendre son papier ? Peut-être, peut-être pas ! J'avais envie de m'amuser un peu, et cette fille semblait être la cible parfaite pour ça. Elle était trop honnête, trop gentille. Et comme on dit, les gentils finissent derniers ! La preuve, son côté obscur n'était pas ressorti malgré la tentation de l'argent, alors puisque tenter de la pousser dans son côté sombre avait échoué, j'allais exploiter le mien. Et donc m'amuser avec elle ! Ce bout de papier en était l'objet, pour l'instant, peut-être aurais-je l'occasion de gratter quelques dollars avec. L'idée de lui extorquer de l'argent pour ce bout de papier me traversa l'esprit, mais dans l'instant, je me disais que ce papier n'était pas assez important pour payer. J'étais même sûre qu'elle serait simplement piquée dans son orgueil, ce n'était qu'un bout de papier après tout. Pourtant, la louve sembla fouiller ses poches une fois qu'elle y ait enfoncé ses mains. Avait-elle perdu quelque chose ? Elle avait l'air de paniquer, ce qui m'aiguilla un peu: ce papier semblait bel et bien important pour elle. Un petit bout de papier, qui semblait la mettre dans tous ses états. Le plaisir grandissait en moi, j'étais satisfaite de la voir perdre son assurance. Elle sembla s'énerver quand elle comprit. Elle comprit que j'étais responsable, et me regarda comme si elle allait me tuer. Mon sourire s'élargit alors. Allait-elle entrer en colère noire ? Je devais me méfier quand même, bien que je n'imaginais pas qu'elle se promène avec un pieu, je devais m'attendre à toute éventualité, et garder une certaine distance. Pourtant, je gardais mon calme, même si mon sourire disparut. J'étais entrée dans une nouvelle phase: celle du bluff, lorsqu'elle m'ordonna de lui rendre.

- Vous rendre quoi ?

Et oui, je décidai de m'amuser encore un peu. Le papier bien enfoncé dans ma poche, qui semblait avoir une telle valeur ! C'était une belle occasion de s'amuser. Je n'avais pas prévu que ça prenne de telles proportions, mais c'était agréable ! Bref, la louve s'approcha dangereusement de moi, elle essayait de se montrer menaçante. Je fronçais alors les sourcils, cette proximité hostile n'attirerait rien de bon.

- J'imagine que cette proximité ce n'est pas pour un baiser, alors reculez si vous tenez à la vie.

Elle empiétait clairement sur mon espace vital, et je n'aimais pas trop ça. Dans la foulée de mon avertissement, je la repoussai des deux mains, pas fort, juste assez pour la faire reculer de deux-trois pas. Je n'avais toujours pas envie de me battre, mais l'importance de ce bout de papier m'amusait.

Nouvelle rencontre.
I've flown a million miles and I've rode so many more. ••• Elle me demandait ce qu’elle devait me rendre. Elle jouait les ingénues. Elle voulait me faire passer pour une folle sans doute ? Non. Pas au regard qu’elle me lançait. Je pouvais presque l’entendre rire. Et moi, j’enrageais progressivement. Oui, je savais ma réaction disproportionnée. Du moins, c'était l’impression que je donnais vu de l’extérieur. Pourtant, je me trouvais totalement sensée. Je savais pour quelle raison je me mettais dans un état pareil. Je savais pourquoi je ne pouvais pas faire comme si de rien n’était. Malgré tout, une part de moi savait que si je le souhaitais, Lyam pourrait me la réécrire cette chanson. J’aurais alors peut-être l’occasion de la plastifier afin que le papier ne puisse être abîmé par les multiples manipulations et le temps. Mais non. C’était ce papier-là que je voulais et pas un nouveau. Celui qui était sali par le rhum qu’il avait renversé en l’écrivant. Celui qui avait le goût amer de mes larmes lorsque je l’avais lu. Celui qui avait été tellement malmené qu'il risquait de totalement s'effriter si je l'ouvrais une fois de plus.

Alors je montrais les crocs - façon de parler pour le moment. Je serrais mâchoires et poings. J’avançais de quelques pas, me retrouvant plus qu’à quelques centimètres d’elle. Je faisais fi de toute preuve de prudence. Etais-je folle ? Peut-être un peu…

L'immortelle ne se démontait pas pour autant, elle ne craignait pas la petite louve que j’étais. Je pouvais la comprendre. Je tentais pourtant d’être un peu menaçante. Les lèvres un peu retroussées sur des dents contractées, le regard noir, la poitrine bombée. Elle ne manqua pas de me provoquer d’avantage. Et ce n’était pas autant sa remarque que son geste envers moi qui m’irrita le plus. En temps normal, j’étais plutôt quelqu’un d’amical, de tactile, même avec les personnes que je ne connaissais que peu. Mais dans cette situation, je n’étais pas la Mia de tous les jours. Non, je laissais parler la louve qu’il y avait en moi. La louve qui n’avait pas eu assez de la dernière pleine lune pour calmer ses ardeurs, son impulsivité.

Deux mains sur ma poitrine et elle me força à faire quelques pas en arrière. Mon cerveau carburait à une allure folle. Il donnait des ordres à mon corps, si vite que je ne pouvais le raisonner, le contrôler. Non. Ni une ni deux, je me saisis d’un des poignées de la blonde et le serrais dans le mien. Suffisamment fort pour qu’elle comprenne que je ne comptais pas me laisser faire sans rien dire. Je savais de toutes manières que je ne pourrais pas lui faire beaucoup de mal. J’étais prête à me montrer plus hostile s’il le fallait, bien que je n’ignorais pas le grand avantage qu’elle aurait sur moi.

Cessez de faire l’innocente, je ne suis pas une idiote, grognais-je.

Ouais, je jouais les gros bras alors que clairement, j’étais toute frêle. Cette scène vu par un regard pur - un humain qui ignore tout du surnaturel - ce devait être drôle à voir. Ridicule peut-être même. Deux jeunes femmes, se faisant face comme si elles allaient se crêper le chignon. Certainement qu’il supposerait qu’on se battait pour un beau jeune homme. Dieu que les apparences étaient trompeuses.:copyright:️ 2981 12289 0