The first page • Ma petite caille

Nouvelle-Orléans. Cette ville était ma ville d’adoption. Je m’y sentais chez moi même si cette notion me semblait confuse car j’avais perdu cette notion il y a de cela très longtemps. On m’avait arraché à mon foyer et ma vie entière avait été une lutte constante pour retrouver cette sensation. Je tenais énormément à cette ville où ma famille vivait, où j’avais pris mes habitudes. Je ne saurais décrire mon attachement à ces rues dans lesquelles régnait une odeur qui savait m’apaiser. Je me sentais à ma place même si je ne me l’expliquais pas réellement. J’avais acquis des petites habitudes qui me collaient à la peau et me permettaient de me repérer même à l’aveuglette dans ces rues. Toutes les odeurs se mélangeaient en un subtil parfum qui savait apaiser mes nerfs sous tension à cause du drame qui avait ravagé cette ville. J’avais peur que l’illusion ne s’envole en fumée à la moindre opportunité, que tout ne s’effondre dans ce monde illusoire où passé et présent, où morts et vivants se côtoyaient en un mélange des plus subtils. La moindre anomalie saurait éveiller mon instinct, titiller mes nerfs pour que je me méfie. Je me sens étonnamment légère sous le doux soleil qui réchauffe l’air en cette après-midi. Le ciel bleu me donne la sensation que tout est parfait. Je me sens libérée du poids de mes soucis alors que j’ai finalement osé formuler ces inquiétudes qui me rongent et mettre fin à une histoire qui s’est bien trop éternisée. Je peux faire ce que je veux désormais et je compte bien en profiter. J’ai envie de m’acheter une nouvelle tenue pour changer de mes vêtements trop austères. J’entre dans une boutique pour acheter une jolie robe printanière. Je ne peux résister à la tentation de la passer directement. Je me regarde dans le miroir et je virevolte. Je souris à mon reflet avec un bonheur libéré de toutes les horreurs qui ont pu se passer dernièrement. Je suis bien décidée à ne rien laisser gâcher ma bonne humeur, ni mes stupides frères et leurs crises existentielles, ni les sorcières qui dirigent ce monde sombre, ni les autres tracas qui pourraient surgit. Aujourd’hui est pour moi. Je ne veux pas que cela soit gâché et je compte bien ignorer les éventuels problèmes qui pourraient se présenter à moi.  Je sors et l’air frais qui balaie le visage me fait du bien. Mais j’ai soudainement la chair de poule me saisit.

Les sens en alerte, je regarde autour de moi cherchant ce qui peut provoquer une telle réaction. Je ne sais pas encore pourquoi ni quoi mais quelque chose se trame. Soudain, je l’aperçois. Il est un peu plus loin et semble nerveux. Je le fixe un long moment avant de comprendre ce qui se passe quand la flamme se propage sur son bras. Je pousse un cri que j’étouffe de ma main. Je ne réfléchis pas alors que l’instinct protecteur prend le dessus. Je prononce le sort de protection alors que je prie pour qu’aucun touriste, aucun habitant n’ait pu remarquer ce qui venait de se passer. Je suis soulagée de constater que cela semble être passé inaperçu. Je grimace alors que mon sort ne risque pas de faire long feu. Je me précipite vers lui attirant quelques regards curieux. Je ne veux pas qu’ils ne se posent des questions alors je me jette à son cou pour l’embrasser. Je murmure contre ses lèvres alors que son bras recommence à flamber. « Joue le jeu pour ne pas attirer l’attention. » Je ne lui laisse que peu de temps pour réagir avant de l’entraîner jouant le jeu d’une personne amoureuse contente de retrouver son petit ami. Je l’entraîne dans une ruelle. Je prononce une formule pour stopper le feu et le pousse légèrement. J’impose une distance entre nous avant de le regarder longuement. Je croise les bras avant de dire plus calmement. « Je suis désolée mais je ne voulais pas qu’ils puissent deviner ce qui se passait. L’innocence est déjà si difficile à préserver alors je voulais faire illusion. » Je m’approche finalement avant de prendre sa main et je me mords la lèvre. Je regarde l’étendue des dégâts avant de prononcer un sort en vue de le guérir. Je me concentre activement restant silencieuse avant de le regarder un long moment. « Je ne peux pas garantir que ta bague fonctionne encore. Tu ferais mieux de rester ici jusqu’à la fin du jour pour que je puisse l’inspecter et la tester sans que tu ne risques d’en être tuée. » Je lui souris légèrement troublée et incertaine quant à son identité. Qui est-il ? Pourquoi j’ai l’étrange impression de le connaître mais sans pour autant savoir où je peux l’avoir croisé. Je lui tends la main avant de murmurer la voix rauque. « Je me présente : Freya Mikaelson et tu es ? »

L’incongruité de la situation me laisse quelque peu pensive mais alors que je suis à présent au calme dans cette ruelle, la pression retombe lentement. Je réalise combien j’ai agi avec spontanéité comme si cela me semblait terriblement logique de sauter au cou du premier homme en détresse dans la rue. Je pose quelques secondes mes doigts sur mes lèvres alors que la sensation est encore très présente. Je l’apprécie. J’ai savouré ce baiser. Je crois que je recommencerais volontiers si l’occasion devait se présenter. Je ne peux m’empêcher de chasser rapidement cette idée reprenant toute contenance. Je ne peux pas me laisser aller. La situation est déjà bien assez compliquée alors que ma rupture est tellement fraiche et le divorce même pas encore prononcé. Kilian souffre de mon choix et je ne peux pas me précipiter dans les bras du premier homme venu par simple plaisir. Cela serait totalement déraisonnable. Je n’avais pas le droit de l’enfoncer après tout ce que nous avions partagé. Mais les sentiments que nous partagions n’étaient plus. Ils avaient péri sans même que je m’en rende compte. Je m’étais rendue à l’évidence. Mais je ne m’attendais pas à ressentir une telle chose après un simple baiser fugace échangé pour sauver une vie et sauver une illusion. Je prends une profonde inspiration alors que je porte un masque neutre en vue de dissimuler ce qui peut m’agiter tout au fond de moi. Je ne peux m’empêcher de me sentir amusée à la répartie du jeune homme alors que je tente de comprendre pourquoi il me semble familier. Je n’ai pas la sensation de le connaître mais je suis certaine de l’avoir déjà aperçu au détour d’une rue ou alors… Cela m’échappe. Mais au fond, quelle importance ? Je n’ai pas pour habitude de me laisser dicter l’impression que je dois avoir d’une personne par quiconque. Même si mes chers frères, trop protecteurs, me mettent en gardent contre un inconnu, je me forgerai ma propre impression. Je n’étais pas faible. Je savais me défendre. Je voulais profiter de chaque instant et de chaque rencontre. J’avais vécu si longtemps endormie que je comptais bien en profiter à chaque instant qui m’étais donné. J’étais jeune et je voulais savourer l’innocence d’un moment. Il semble plutôt nerveux et cela m’amène à rire. Je me sens tellement amusée de le voir si anxieux à l’idée de rester enfermé dans cette ruelle. Je ne suis pas surprise de découvrir un jeune homme au tempérament de feu. Je me demandais si je risquais de me brûler les doigts à m’approcher trop près de sa flamme ?

« Monsieur me semble bien nerveux. Il n’y a pas de mal à perdre une après-midi dans une ruelle si cela te sauve la vie et t’offre une éternité. L’ennui t’aidera peut-être à comprendre tout seul ce qui se passe ? Mais comme j’ai un doute… » Moqueuse, je tiens de la famille ce côté provocateur. Je me passe la main dans les cheveux adoptant une attitude séductrice par pure envie de jouer un peu. Si nous devions rester coincé dans cette ruelle, autant que ce soit un bon moment plutôt que de se fixer dans le blanc des yeux sans un mot. Je pouffe de rire avant de dire d’une voix douce. « Te tenir compagnie ? Je pourrais envisager de perdre mon après-midi pour tes beaux yeux si tu te montres gentil. » Je t’adresse un petit clin d’œil en souriant doucement. Je me demande bien pourquoi j’accepte. Je devrais le laisser là mais dans le fond, cette magie dysfonctionnant me laisse totalement pensive. Imprévisible, elle échappe à tout contrôle et cela m’angoisse. J’ai peur pour ceux que j’aime même si la lumière du jour ne peut rien leur faire. Je me dis que vu comment certains semblent s’amuser, il me semble important de percer ce mystère avant que ça ne devienne complètement pire. Je garde néanmoins un ton léger. « Tu as apprécié ? Je suis heureuse de l’apprendre mais ce n’était que pour jouer le jeu des illusions. Ne crois pas que c’était par plaisir. » Je rigole avant de t’observer soudain curieuse de comprendre ton changement d’attitude. Mon nom était connu. Je détestais procurer cette sensation comme si le danger n’était jamais très loin quand on parlait des Mikaelson. Je grimace légèrement à ses mots avant de hausser les épaules. Je ne réagis néanmoins pas une seule seconde. Je fais comme si cela ne me touchait pas du tout. Mais je te regarde soudain intriguée à la mention de ton nom. Je finis par éclater de rire. « Malachai Parker. Qui l’aurait cru ? Je suis vraiment surprise. Cela ne m’étonne donc pas que tu t’y connaisses en termes de magie. Mais visiblement, j’ai encore quelques petits trucs à t’apprendre. » J’hésite un long moment avant de finir par soupire de résignation. Ce qui se passe ? Je ne sais pas trop comment l’expliquer. Je cherche de longs moments mes mots. Je hausse les épaules ménageant mon petit effet. Je finis par dire avec une pointe d’hésitation dans la voix. « La ville a été détruite. Tout ici n’est qu’illusion. Et la magie est défaillante. En quelque sorte, je dirais que tu dois être mort et revenu à la vie. Nous sommes dans un théâtre où le metteur en scène s’amuse avec nos vies. » Je dis cela avec un certain cynisme.

Détendue, cette situation ne m’inquiétait pas le moins du monde. J’aurais pu laisser la panique m’ensevelir mais je savais qu’à tout problème, il y avait sa solution. J’avais cru perdre ma famille à de si nombreuses reprises. Je l’avais vue se disloquer encore et encore mais rien n’avait jamais empêché que nous trouvions la voie pour nous retrouver. Je savais que si cette ville pouvait nous voir tomber tout un chacun dans ses pièges, j’avais confiance que nous parviendrions à en démêler les mystères. J’avais vu cette ville tomber, je pouvais m’en souvenir. Enfin, j’en avais la sensation. Et pourtant, nous étions tous là revenus de nos cendres. J’étais reconnaissante aux forces qui nous avaient tirés de nos abysses même si elles se jouaient de nous. Alors sa peur ne peut que m’amuser et je hausse les sourcils en secouant la tête d’amusement. [color=#338866]« Le sarcasme ? Je vois que tu pratiques cet art avec brio. C’est fort intéressant. Tu me rappelles mon frère, il excelle également dans cette pratique. Mais souvent le sarcasme cache un manque d’assurance mais ne t’en fais pas, je ne vais pas te laisser te changer en torche humaine. Donc reste sous ma protection mon petit. » Je lui adresse un petit clin d’œil. Je souris doucement en croisant les bras sous ma poitrine ne pouvant m’empêcher de prendre un certain plaisir à te provoquer. Je ne le fais pas par méchanceté. Le sérieux me caractérise la plupart du temps alors ça ne peut qu’être le signe que je me sens détendue en sa compagnie. J’ai envie de relâcher la pression et de me laisser aller. Je me mordille la lèvre avant de répondre avec humour. « Ton sourire ? Je ne suis pas d’accord. Il sonne faux et on sent trop fort qu’il faut se méfier. Je devine que tu n’es pas du genre très fréquentable à ton sourire. » Cela ne peut que me rappeler le sourire de mon frère et j’en éprouve une forme de tendre affection. Ils devraient être les meilleurs amis tout deux si seulement, ils se connaissaient mais ils ne pourraient que faire des conneries ensemble. « Mauvaise garçon ? Tellement prévisible mais j’ai l’habitude. Il en faut plus pour m’impressionner. Tu me rappelles mon frère. » Je me mords la lèvre doucement partagée entre jouer de l’indifférence et lui laisser entrevoir que je l’apprécie réellement. « Et je vois que tu as également un égo surdimensionné. Tu t’entendrais si bien avec Niklaus. Désolée de te décevoir joli cœur mais je suis totalement insensible à ton charme. » Mensonge, je détourne rapidement le regard pour ne pas le laisser entrevoir que je mens comme une arracheuse de dents.

Je prends une profonde inspiration alors que je suis déboussolée par cette rencontre. Je ne m’étais pas sentie si jeune depuis des siècles. Je soupire lourdement alors que je tapote légèrement du pied. Sa question me prend de court mais je ne sais pas bien comment lui répondre. Je connais énormément de choses sur cette ville. Pendant que certains profitent de leur vie, je me contente d’observer et fureter dans tous les sens pour obtenir des bouts de réponses. Je suis attentive à chaque détail pour prendre un avantage certain sur le terrain. Je finis par le regarder à nouveau répondant avec une fausse assurance. « Car tu n’es clairement pas le genre de personne que je devrais fréquenter. Tu n’es pas très apprécié en ces lieux, que du contraire. Je ne veux pas griller ma réputation en une compagnie si… méprisable de ce que l’on en raconte. Alors cela m’amuse terriblement. » Je finis par éclater d’un rire profond. Tout cela est vraiment très amusant. Je ne sais pas pourquoi ça le dérange tellement cette situation mais je trouve que cette discussion est plutôt plaisante. Je ne peux m’empêcher de sourire en coin très amusée. « Te tester ? Dans quel domaine ? Quelle excellente idée mais disons plutôt que je pense connaître quelques petites choses qui pourraient te surprendre. » Je t’adresse un clin d’œil complice avant de reprendre mon sérieux. Je cherche comment expliquer les choses. Ce n’est pas simple de résumer la situation alors que je ne peux m’empêcher de ressentir une certaine angoisse. Ce n’est pas simple de comprendre mais cela m’oblige surtout à penser à ma mère. Cela me force à reconnaître qu’elle n’est pas étrangère à ce merdier. « Bah techniquement, ce monde a été détruit donc tu es mort une troisième fois. Simplement, tu n’en as pas conscience. On ne s’en sort pas si mal même si on est sous le pouvoir de sorcières surpuissantes qui se jouent de nous. Ma mère a contribué à la renaissance de cette ville mais c’était cela ou le néant… Là on peut juste tenter de survivre à leurs petits jeux et à l’instabilité de ce monde. » Je suis terriblement résignée ne cherchant pas à lutter contre cette évidence que nous avions de la chance dans toute malchance. Je me lèche la lèvre et hausse les épaules. Je lève le regard vers le ciel pour savourer la vue de cette voute sur nos têtes.

L’inattendu détient entre ses mains une part de mystère qui peut rendre l’existence bien plus palpitante. Je n’aurais jamais pu deviner la tournure que cette journée prendrait et cela me surprenait agréablement. Je rigole légèrement alors que je ne me souviens pas la dernière fois que j’ai réellement pris autant de plaisir. Je réponds avec une note d’humour bien piquée. « Avouer ? Tout de suite les grands mots. Je suis curieuse en effet. Puis crois-tu vraiment que l’on rechigne à fréquenter l’infréquentable quand on est une Mikaelson ? A bien des égards, mon frère l’est et encore bien davantage que tu ne peux l’être. Il te faudrait des siècles pour te forger une aussi mauvaise réputation que la sienne. Quant au sage Elijah, permets-moi de douter qu’il le soit tant que cela. Sincèrement, il en faut bien plus pour me faire rebrousser chemin, ma famille entière est l’exemple même de ce qui est infréquentable. » Je me souviens de l’époque où je les observais de loin alors qu’ils n’avaient pas même idée que j’étais toujours vivante. J’avais éprouvé de l’animosité devant le chemin qu’ils avaient emprunté. J’avais songé les condamner sans même songer leur donner une chance. Mais ils étaient mon sang et j’étais curieuse alors je leur avais laissé le bénéfice du doute. Cela m’avait permis de découvrir que sous les apparences les plus sombres se cachaient des êtres avec leurs forces. J’avais pu apprendre les aimer malgré leur travers alors je ne comptais pas le condamner malgré la réputation qu’il se trimballe. S’il désire prendre un autre chemin, je pourrais même l’y encourager mais ma précédente suggestion était une erreur dans ce sens. « Je pense que vous pourriez vous quereller avec brio. Vous risquer fort d’entrer dans un combat de coq pour déterminer lequel est le plus ci ou lequel est le plus ça. Mais sinon vous formeriez un duo qu’il vaut mieux ne pas voir se former. Je tiens à un peu de quiétude pour cette ville. » Les deux s’unissant pour semer la zizanie dans les rues n’étaient pas une perspective qui m’enchantait que du contraire. Je soupire légèrement en imaginant les massacres qu’ils pourraient commettre ensemble. Mais je saisis la première opportunité de chasser cette idée. « Et qu’est-ce qui te fait dire que je suis ce genre de fille ? Et tu penses vraiment que te côtoyer peut me corrompre ? Il en faudrait donc si peu pour griller ma réputation ? Je suis donc foutue donc autant jouer avec le feu et continuer à te côtoyer. »

Je me plaisais en sa compagnie alors je ne comptais pas m’en priver. Il me lance un défi et je lui adresse un clin d’œil en hochant la tête. Je dois trouver comment frapper fort et une idée me vient en tête. C’était l’occasion rêvée de tester ce petit sort que j’avais concocté et il risquait fort d’en être extrêmement surpris. Je doutais même qu’il aime. « Te surprendre ? Ne te plains pas de l’être alors. » Tout en farfouillant dans mon sac, je m’approche lentement de lui avant de soudainement lui arracher une mèche de cheveu et prendre une goutte de sang. Je les mets dans le petit récipient en bois que j’emmène partout avec moi. Je m’agenouille au sol y ajoutant un peu de terre et d’eau. Je le scrute du regard avec attention tout en mélangeant une étrange mixture. Je hausse les épaules à sa remarque. « Il ne serait pas drôle d’avoir reconstruit la ville pour que ça devienne un lieu fantôme, de perdition. Je suppose que ce n’était pas trop possible de sélectionner qui pourrait franchir la porte du vivant. Et visiblement, voir les vampires courir comme des souris dans un labyrinthe lorsque leur bague déconne semble être un spectacle amusant. » Je peux sentir que malgré les apparences, il y a de l’inquiétude en lui. Sa petite démonstration de rage m’arrache un rire d’amusement alors que je secoue la tête. Il avait de la colère en lui le petit, c’était amusant. Je pourrais me moquer au point de tester ses limites, de découvrir combien il en faut peu pour le faire craquer mais nous étions coincés ici un petit moment. Je n’avais pas envie de supporter ses humeurs mais j’ajoute avec douceur et compassion. « Il va te falloir apprendre à vivre dangereusement car cela échappe à toute logique ou alors je ne l’ai pas encore comprise. » Je me redresse finalement après avoir prononcé une formule pour donner toute son action à ma préparation. Je verse le contenu dans une fiole que je lui tends. Je souris en coin en réfléchissant quelques instants à la meilleure manière de présenter les choses. « Tu ne devrais plus avoir à souffrir du fait que ta bague ne fonctionne pas. Mais en magie, tout a un prix et je doute que celui-ci te plaise donc je t’ai préparé l’antidote. Et si tu essayais de me mordre ? » Je sais très bien qu’il n’y arrivera pas et cela m’amuse. Les humains ne craignent rien dans ce monde.

Les rêves étaient tout ce que j’avais eu pour fuir la douleur pendant une longue époque. Je n’avais rien d’autre que les chimères que je me racontais pour m’accrocher à la vie alors que ma réalité était terriblement douloureuse. La vie avec ma tante n’avait pas été de tout repos alors je m’étais forgée un monde empli de rêves à réaliser dont le cœur même était toujours de retrouver ma famille. J’éclate donc d’un rire franc à sa remarque. « Moi rêver ? Quand tout s’obscurcit, les rêves c’est parfois tout ce qu’il nous reste alors je préfère rêver un peu trop plutôt que d’avoir perdu cette capacité. Ça te va plutôt mal d’être aussi désabusé. » Je lui fais un petit clin d’œil complice avant de hausser légèrement les épaules. J’ai envie de me moquer de lui car il pense tout savoir mais dans le fond, il ne sait rien. Je me demande pourquoi il reste surpris mais surtout pourquoi il se demande ce que je peux bien faire. C’est un sorcier non ? Il devrait savoir que ces éléments sont des plus basiques pour toute sorte de potions. « Je ne sais pas moi. Je me suis dit que ce serait amusant mais sans aucune utilité bien évidemment. Tu poses des questions idiotes par moment. » Je le regarde longuement pendant quelques minutes tentant de sonder son âme. Il était étrange de se retrouver face à un être qui pouvait se révéler être un atout ou un danger. Il était telle la grenade qui dégoupillée trop tôt ou trop tard pourrait nous causer plus de dégâts que prévu et au lieu de nous débarrasser de nos ennemis nous exploser au visage. Je ne savais pas comment réagir hésitant entre lui accorder une once de confiance ou m’en méfier comme la peste. Mais j’étais une Mikaelson et j’appartenais à une famille qui inspirait la peur. J’étais l’une des plus vieilles et puissantes sorcières. Je n’avais rien à craindre de sa part alors je m’amusais à jouer avec lui me demandant s’il pourrait me suivre sur le chemin que je traçais. Je n’avais plus peur de rien car j’avais passé de bien trop nombreux siècles à redouter le pire. J’avais une famille et je donnerais tout pour les protéger quitte à me sacrifier. C’est pour cette raison que même la mort ne pouvait m’effrayer.

Je rigole légèrement à sa remarque songeant qu’il est un peu naïf sur les bords. « Un crapaud ? Tu n’es déjà pas très beau comme ça alors en crapaud ce serait encore pire. Je préfère te garder tel que tu es. En plus, ce serait gaspiller mon immense pouvoir que de l’utiliser à une telle fin. » Je me moque de lui sans même tenter de m’en cacher. Mais je me demande si cela présente le moindre intérêt de poursuivre cet échange. Il commence à me lasser alors que je pensais que c’était un être prêt à prendre des risques. Je le regarde légèrement hautaine. « Tu vis dangereusement mais je te trouve légèrement ennuyant. J’aurais cru que tu serais du genre à tenter toute expérience même nouvelle et inconnue. Quel dommage de m’être trompée ! » Je peux lire la méfiance dans son regard alors qu’il refuse de simplement prendre la potion que j’ai concoctée. Il ne pense pas pouvoir me faire confiance mais alors je ne vois pas vraiment l’intérêt de poursuivre cette discussion. Je peux comprendre qu’il pense qu’il y a un quelconque piège dans ce que j’ai mijoté. J’en suis presque déçue et je fais une petite moue dépitée avant de hausser légèrement les épaules. « Je croyais que tu oserais prendre cette potion sans rechigner. Idiot ? Non pas le moins du monde. Je te donne l’antidote alors je ne vois pas pourquoi tu te méfierais. Si j’avais voulu te faire du mal, je t’aurais simplement laisser cramer au soleil sans me poser la moindre question. Je t’ai laissé une devinette pour savoir ce que c’était. Quelque chose qui te protègera du soleil. » Je croise les doigts pour qu’il m’accorde sa confiance mais n’aurais-je pas été déçue qu’il prenne ce que la première inconnue venue lui propose. Je voudrais tout simplement me dire qu’il y a quelque chose de spécial entre lui et moi. Il me plait bien tout simplement. « Mon trip ? Ah peut-être bien mais ce droit s’accompagne d’une condition. Bois. Tu le découvriras. Il n’y a pas la moindre entourloupe. Il n’y a pas le moindre piège. Si tu n’as pas confiance, je ne vois pas l’intérêt de poursuivre. » Je croise les bras sur la poitrine prête à lui faire morfler s’il essaie de me mordre avant d’avoir fait ce que je demande. Je regarde ses crocs sans la moindre frayeur.